Cancer de l’ovaire : des cellules épithéliales modifiées dans les trompes de Fallope
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Une étude menée par Mayo Clinic, parue dans le JCO Precision Oncology, a amené à l’observation que les cellules épithéliales des trompes de Fallope étaient modifiées chez des patientes présentant un type de cancer de l’ovaire. Ainsi, les cellules sécrétrices étaient bien moins nombreuses que les cellules épithéliales ciliées chez ces patientes.
Les origines conduisant au cancer ovarien sont encore mal connues et, jusqu’à présent, il n’existe pas encore de moyen de le détecter de façon précoce. Mayo Clinic a récemment fait une découverte qui pourrait ouvrir la voie à la détection de la maladie dans ses stades plus primitifs et précancéreux, à un moment où la prévention est donc encore possible.
Il faut noter que, dans environ 75% des cas, lorsqu’une femme est diagnostiquée d’un cancer ovarien, il a déjà progressé vers les stades 3 ou 4, ce qui a pour corollaire qu’il s’est déjà étendu à d’autres parties du corps. Des chercheurs, médecins et patientes de la Mayo Clinic ont commencé à travailler ensemble dans le but d’en apprendre davantage sur cette maladie lorsqu’une patiente, âgée de 23 ans et qui présentait deux conditions génétiques rares accroissant dramatiquement le risque de cancer, s’est rendue à dans l’un des centres du groupe de recherche.
Cette patiente portait en effet une mutation héréditaire de BRCA2, qui est l’un des gènes qui engendre le syndrome héréditaire de prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire, ainsi qu’une mutation héréditaire de TP53, qui provoque le syndrome de Li-Fraumeni. La patiente a été diagnostiquée comme étant porteuse d’un cancer du sein. L’imagerie a alors révélé qu’elle présentait également un kyste ovarien. Bien que ce kyste soit bénin, elle a choisi de subir une mastectomie ainsi qu’une hystérectomie, au cours de laquelle lui ont été retirées ses ovaires et les trompes de Fallope (salpingo-ovariectomie). Lors d’examens ultérieurs, l’équipe de recherche a détecté des changements précoces et cachés dans les cellules qui tapissent les trompes de Fallope, révélant des signaux qui pourraient pointer les premiers signes de cancer ovarien avant même que des symptômes ou des lésions visibles n’apparaissent !
Focus sur les cellules épithéliales
Dans le communiqué du groupe Mayo Clinic, les chercheurs expliquent ainsi, qu’en utilisant des technologies « single cell », l’équipe a révélé un phénomène rare dans la biologie épithéliale : « Nous avons retracé la manière dont les cellules épithéliales de cette patiente étaient altérées dans leur développement, signalant un haut risque de cancer ovarien de mauvais pronostic », indique le docteur Nagarajan Kannan, co-auteur de l’étude et directeur du laboratoire des cellules souches et biologie du cancer à Mayo Clinic.
« Nous savons que la forme la plus agressive et commune de cancer de l’ovaire début le plus souvent dans les trompes de Fallope. Savoir comment débutent les cancers ovariens pourrait non seulement amener au développement d’outils de screening précoces, mais également aboutir à des stratégies plus personnalisées de réduction des risques et améliorer le suivi autour de la chirurgie préventive et des plannings de fertilité », précise à son tour le dr Bakkum-Gamez, également co-auteur de l’article.
Biobanques de trompes de Fallope
Ensemble, ces deux docteurs et leurs équipes ont donc établi une biobanque de trompes de Fallope. Ainsi, les cellules et tissus donnés par les patients aident les scientifiques à étudier comment débutent les cancers ovariens – cellule par cellule – directement sur le tissu humain. À partir des spécimens des patients, des organoïdes, ou de petites versions des trompes de Fallope peuvent être cultivées. Ces biobanques incluent des organoïdes provenant de patientes avec un risque moyen à élevé de cancer ovarien et présentant des mutations génétiques de cancer.
« L’origine cellulaire précise du cancer ovarien demeure l’une des plus grandes questions sans réponse dans sa prévention », rappelle encore le Dr Kannan. Des trompes de Fallope en bonne santé sont formées de deux types de cellules épithéliales : les cellules multi-ciliées, qui présentent des centaines de cils et aident à faire mouvoir les œufs fertilisés à travers les trompes de Fallope, et les cellules sécrétrices qui sécrètent des fluides pour nourrir et protéger l’embryon en développement. Dans les trompes de Fallope collectées chez les patientes avec un syndrome héréditaire de prédisposition de cancer du sein et de l’ovaire ou un syndrome Li-Fraumeni, les scientifiques ont vu ce qui n’avait jamais été observé : à la place des deux types de cellules épithéliales, les cellules sécrétrices étaient en large infériorité numérique par rapport aux cellules multi-ciliées. Ils ont également découvert des cellules sécrétrices qui conduisaient à une inflammation chronique – soit, un contributeur connu du développement du cancer.
La prochaine étape des travaux consistera à utiliser les biobanques de trompes de Fallope vivantes pour investiguer comment et où prennent racine les origines les plus précoces des cancers ovariens.







